Investissements étrangers dans l'immobilier commercial au Royaume-Uni
Insight
Le fait de mettre en conformité les investissements étrangers sur le marché immobilier résidentiel britannique, au sens de la loi fiscale de 2015 a pu être considéré par le gouvernement comme un objectif flou. À compter du mois d'avril 2019, les investisseurs devront envisager l'impact des impôts britanniques sur les investissements dans l'immobilier commercial et les effets de ceux-ci sur les rendements globaux.
Le présent exposé examine l'application des impôts fonciers britanniques en matière de biens non résidentiels au moment de l'acquisition, pendant la possession et lors de l'éventuelle cession.
Au moment de l'acquisition - Droits de Mutation Immobilière (SDLT)
Les SDLT concernent les biens situés en Angleterre et en Irlande du Nord. L'Écosse et le Pays de Galles ont introduit leurs propres droits de mutation, qui sont similaires mais pas identiques aux SDLT.
Les SDLT sont payés par l'acquéreur sur le prix d'acquisition (y compris toute TVA versée), selon les taux suivants:
Prix d'acquisition |
Taux SDLT % Assiette sur quote-part du prix d'acquisition relevant de chaque tranche |
0 – 150 000 £ |
0 |
150 000 – 250 000 £ |
2 |
Solde |
5 |
Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA)
La TVA est une taxe européenne imposée sur les marchandises et les services. L'acquisition d'un bien immobilier, en freehold (pleine propriété) ou en leasehold (bail à long terme du bâtiment) ou l'octroi d'un bail, sont des opérations généralement exonérées de cette taxe. En revanche, si le cédant a « opté pour l'assujettissement », la TVA est appliquée au taux de 20% en sus du prix d'acquisition. Le fait d'exercer l'option d'assujettissement fait sortir le bien du régime d'exonération qui devient alors assujetti au taux standard. Un propriétaire immobilier choisira normalement d'opter pour l'assujettissement si des frais doivent être engagés pour le bien, étant donné que cela permettra de récupérer la TVA sur les dépenses. Cela veut dire que le propriétaire-investisseur doit facturer la TVA sur les loyers à payer par les locataires.
L'apport d'un bien commercial ne relève pas du champ d'application de la TVA si cela constitue un transfert d'activité sans interruption d'exploitation (TOGC). Ce sera le cas si le bien est donné à bail ou fait l'objet d'un contrat de bail même si le locataire prospectif n'a pas encore débuté l'occupation. Si la vente de l'immeuble constitue un TOGC, alors aucune TVA n'est à facturer par le vendeur, sous réserve que (et c'est là une condition importante) l'acquéreur soit tenu d'opter pour l'assujettissement, avec pour conséquence pour l'acquéreur que toute fourniture alors réalisée par ce dernier est taxable.
Si l'acquisition du bien ne constitue pas, pour quelque raison que ce soit, un TOGC, de sorte que la TVA est due, si l'acquéreur opte pour l'imposition, la TVA payée sur l'achat devrait pouvoir être récupérée à titre de taxe en amont. Les coûts nets correspondraient donc au coût de portage de financement de la taxe payée sur l'acquisition jusqu'à son remboursement par les HM Revenue and Customs (HMRC ou l'administration fiscale britannique) ou à son analyse comme crédit sur TVA déductible.
L'option à l'assujettissement, ayant pour effet pour le propriétaire d'un bien qu'il commence à réaliser des activités taxables au Royaume-Uni, veut dire que le propriétaire est immatriculé au Royaume-Uni à des fins de TVA dans le but de rendre compte de la taxe.
Pendant la durée de la possession - Impôts sur les Revenus et Impôts sur les Sociétés
Les impôts sur les revenus britanniques sont appliqués aux loyers générés par les biens au Royaume-Uni. Si le bien est détenu à titre individuel, les taux d'impôts sur les revenus en vigueur au moment considéré sont applicables. Actuellement, le taux le plus élevé (imposé sur les revenus annuels supérieurs à 150 000 £) est de 45%.
Les entreprises ne résidant pas au Royaume-Uni paient également les impôts sur les revenus au taux de 20% sur leurs revenus locatifs britanniques alors que les entreprises britanniques paient l'impôt sur les sociétés (actuellement 19%). À partir du mois d'avril 2020, les sociétés ne résidant pas au Royaume-Uni seront assujetties à l'impôt sur les sociétés sur leurs loyers locatifs britanniques, et le taux devrait être de 17%.
Certaines dépenses associées au bien sont déductibles fiscalement, dont les frais de maintenance et les coûts financiers. Mais ce principe est partiellement limité pour les propriétaires individuels.
Un locataire payant un loyer à un non-résident au Royaume-Uni (personne physique ou morale), ou un agent collectant des loyers pour le compte d'un propriétaire non résident, sont tenus de déduire et de rendre compte d'un prélèvement à la source de 20% sur les loyers perçus. La responsabilité du paiement des prélèvements à la source est normalement évitée en demandant aux HMRC d'appliquer le Non-Resident Landlord Scheme (ou Régime des Propriétaires Non Résidents). Le propriétaire doit alors déposer une déclaration d'impôts annuelle aux HMRC et payer les impôts, avec pour effet de meilleurs flux de trésorerie.
Les taxes sur les loyers sont calculées après déduction des frais déductibles. Les frais de financement représentent généralement les coûts les plus importants. Les intérêts sur les prêts destinés à l'acquisition d'un bien peuvent être déduits des revenus mais s'ils sont à payer à une partie liée, alors le taux doit respecter le principe de pleine concurrence et le montant de l'emprunt ne doit pas excéder le montant qui aurait été emprunté auprès d'une partie non liée, comme une banque. Dans la mesure où le montant des intérêts payés dépasse ces limites, les intérêts ne devraient pas être pris en compte dans le calcul des impôts.
Une fois les sociétés non résidentes intégrées au régime fiscal des sociétés en 2020, les règles de restriction des intérêts des sociétés seront applicables. L'objectif des règles est de limiter les déductions d'un groupe associées aux frais d'intérêts et aux autres frais de financement à un montant proportionnel à ses activités imposables au Royaume-Uni, en tenant compte du montant que le groupe emprunte auprès de tiers. Les règles ne seront pas appliquées aux groupes dont les frais nets d'intérêts sont inférieurs à 2 millions GBP par an et le mot « groupe » comprend à cette fin les entreprises indépendantes.
Qui est concerné par les règles de restrictions de passif:
Les règles sont entrées en vigueur le 1er avril 2017 et sont appliquées aux sociétés au niveau du groupe. À cette fin, le « groupe » comprend les sociétés relevant du régime d'imposition des sociétés au Royaume-Uni (y compris les établissements permanents des sociétés non résidentes). La définition de « groupe » se base sur le concept comptable de groupe et elle inclut donc la société mère ultime et toutes les entités consolidées dans les états consolidés de la société mère sur une base de ligne par ligne. Le résultat devrait exclure les associées et les coentreprises (joint ventures).
Fonctionnement des règles
Les règles limitent les déductions d'intérêts d'un groupe (et les autres coûts de financement comparables) à un « ratio fixe » ou un « ratio de groupe ».
La règle du ratio fixe limite les déductions d'intérêts à 30% de l'EBITDA imposable au Royaume-Uni. Une règle de plafonnement du passif modifiée garantira que la déduction nette des intérêts au Royaume-Uni ne dépassera pas le total net des frais d'intérêts du groupe à l'échelle mondiale.
La règle du ratio de groupe peut permettre de se prévaloir d'une plus grande déduction pour les frais d'intérêts. En vertu de cette règle, les déductions d'intérêts du groupe sont limitées en fonction du rapport entre les frais nets d'intérêts du groupe mondial et l'EBITDA mondial du groupe.
Les intérêts à payer aux parties liées sont exclus de la règle de ratio de groupe.Les montants des intérêts réduits peuvent être reportés sans limite et imputés au cours d'exercices ultérieurs s'il existe une possibilité de déduction des intérêts suffisante. La quote-part de déduction d'intérêts non utilisée peut également être reportée, mais ce seulement jusqu'à cinq ans.
Lors de la cession - Imposition des Plus-Values (CGT)
L'imposition des plus-values est actuellement appliquée à tous les propriétaires étrangers de biens résidentiels au Royaume-Uni, que le bien soit détenu à titre individuel ou par l'intermédiaire d'un trust ou d'une société.
À compter du mois d'avril 2019, les non-résidents au Royaume-Uni détenant de l'immobilier commercial au Royaume-Uni seront assujettis au régime des plus-values britanniques. Cela veut dire que, à compter de cette date, tous les propriétaires fonciers non résidents au Royaume-Uni relèveront du champ d'application de l'imposition des plus-values au Royaume-Uni, y compris les fonds d'investissement à capital largement réparti. Les législations britanniques seront donc finalement en harmonie avec la plupart des autres juridictions fiscales et la théorie d'imposition des biens fonciers selon leur lieu de situation.
Les nouvelles règles s'appliqueront également aux cessions de participations dans des fonds communs de placement riches en propriétés, à savoir des entités tirant au moins 75% de la valeur brute de leurs actifs de biens fonciers sis au Royaume-Uni. Les plus-values dégagées sur la cession de participations dans un tel fonds s'élevant à 25% ou plus seront imposées au Royaume-Uni. Les biens commerciaux ne seront imposés que sur les plus-values acquises après le mois d'avril 2019.
Promoteurs immobiliers et marchands de biens
Les règles concernant les Transactions de Biens Fonciers au Royaume-Uni ont été introduites en 2016 dans le but de contrecarrer les prétentions affirmant qu'un projet de développement ou une transaction sont réalisés en dehors du Royaume-Uni et ne sont donc pas assujettis à l'imposition au Royaume-Uni. Les bénéfices tirés d'un projet de développement relèvent donc du champ d'application des impôts sur les revenus ou des impôts sur les sociétés, en fonction de la personne le poursuivant. Ces règles s'appliquent également en cas d'accords de vente du promoteur plutôt que du terrain lui-même. Elles sont appliquées dans le cas où des titres (par exemple) sont vendus et dont la valeur découle, au moins à concurrence de 50%, de biens fonciers britanniques.
Lors du décès - Droits de Succession (IHT)
Les biens résidentiels britanniques détenus directement sont toujours assujettis aux IHT lors du décès du propriétaire ou dans le cas de certaines donations, sous réserve de certaines exonérations et exemptions. À compter du 06 avril 2017, tous les biens résidentiels basés au Royaume-Uni, qu'ils soient détenus directement ou indirectement, seront assujettis à cet impôt (à l'exception des biens détenus par des fonds de placement diversifiés).
Les biens commerciaux détenus directement par une personne physique sont de la même manière exposés aux IHT au Royaume-Uni. Il n'existe, à la date du présent exposé, aucun terme suggérant que les biens commerciaux détenus indirectement via une société ou un véhicule comparable deviendront soumis aux IHT mais le gouvernement britannique pourrait, en temps utile, considérer qu'il s'agit là de la prochaine étape logique.
Observations et conclusions
Compte tenu des changements susvisés:
- Il n'est désormais plus possible de se livrer à des activités de promotion immobilière et de négoce des biens fonciers au Royaume-Uni sans que les bénéfices dégagés par l'activité soient exposés à l'imposition britannique.
- Après le mois d'avril 2019, il ne sera plus possible d'éviter l'imposition des plus-values britanniques sur les plus-values immobilières, que l'immobilier soit détenu par, ou que le propriétaire soit, ou non, résident au Royaume-Uni. Il conviendrait de déterminer soigneusement si les coûts d'établissement ou de maintien d'une structure offshore qui serait propriétaire des biens fonciers en valent la peine.
- Les structures traditionnelles « Opco/Propco » (société d'exploitation / société immobilière), conçues de sorte que les biens fonciers soient la propriété d'une société offshore dans le but d'éviter l'imposition des plus-values tout en permettant la gestion des opérations au Royaume-Uni via une société britannique (par exemple, l'approche adoptée pour la propriété des hôtels), sont d'ores et déjà superflues dans les faits. La propriété et l'exploitation par l'intermédiaire d'une entreprise continuent cependant de conférer des protections contre les Droits de Succession.
- Une entreprise, qu'elle soit onshore ou offshore, reste avantageuse si la responsabilité limitée est requise, notamment dans le contexte des projets de promotion immobilière. En outre, l'acquisition d'une entreprise continue d'exclure l'obligation de SDLT à 5% et seul un taux de 0,5% est à payer (s'il s'agit d'une entreprise britannique) ou de 0% (s'il s'agit d'une société étrangère en cours d'acquisition ou de vente).
- Il peut exister de bons motifs sans rapport avec la fiscalité de choisir un trust, comme des raisons de confidentialité, de planification successorale et de protection des actifs. Parallèlement, il convient de tenir compte des obligations déclaratives et de conformité de plus en plus strictes dans le cadre des trust et sociétés offshores.
L'obtention de conseils en fiscalité personnalisés est cruciale. Les investisseurs qui détiennent déjà des biens au Royaume-Uni pourraient souhaiter réévaluer leur position afin de déterminer leur exposition à des obligations ou risques évitables en matière fiscale.
La présente publication constitue un résumé général du droit. Le droit et les taux d'imposition mentionnés aux présentes sont à jour au mois de juin 2018. Elle ne saurait, en aucun cas, se substituer à un avis juridique adapté à votre situation spécifique.
© Farrer & Co LLP, Juin 2018